Bizarrement, en cet instant où elle se tenait debout devant Jack, attendant anxieusement une réponse à sa question, un souvenir commença à refaire surface. Un souvenir, enfoui très profondément jusque là dans le fin fond de son esprit de petite fille, un souvenir qu'elle tenta de remettre sous la couche de poussière. Sauf, que lorsqu'on époussette quelque chose, nous ne pouvons remettre la poussière et il faut attendre que d'autre retombe. Ainsi, la jeune femme ne put que le laisser passer: il avait été trop longtemps enfermé dans le coffre-fort des mémoires douloureuses...



Une petite fille, assise à la table de la cuisine, la tête dans la main et la plume contre la lèvre réfléchissait profondément. Un livre était ouvert devant elle et une pile de bouquins traînaient sur la chaise à côté d'elle, de même qu'une dizaine de parchemins. June faisait ses devoirs de vacances avec un zèle que la plupart des élèves n'ont pas. Elle ne rechignait jamais à faire des travaux pendant la période estivale parce qu'elle n'avait rien d'autre à faire et que ces livres et papiers lui donnaient l'impression de rester en contact avec le monde des sorciers... Aucunes de ses amies ne lui écrivaient; seul son professeur, M. Sheppard, le faisait. Un instant, elle considéra lui envoyer une missive par hibou afin de demander son aide au sujet de cette question piège en potions puis se ravisa: elle ferait son devoir et le lui enverrait une fois terminé et relu. Elle était presque certaine que la réponse ne serait pas la bonne, mais au moins, il serait fier d'elle parce qu'elle aurait essayé. Il faisait une chaleur caniculaire en ce mois de juillet et June aurait bien aimé aller plonger dans l'eau fraîche de la rivière. Cependant, sa mère le lui avait interdit et la petite fille avait bien trop peur pour lui désobéir. D'ailleurs, parlant du loup...

- June ?...

La voix d'Andrea Rogue retentit dans la maison et la fillette lâcha aussitôt sa plume pour se précipiter dans les escaliers. Elle savait qu'il ne fallait pas la faire attendre... sinon on s'exposait à de graves conséquences. Elle avait pris soin de ramasser un bout de parchemin dans le but de demander à sa mère de signer pour qu'elle puisse aller à Pré-au-Lard. Une heure plus tard, elle sortait avec son papier dans la main qui dégageait maintenant une odeur suspecte pour tout le monde qui n'était pas habitué à l'odeur de l'alcool...



- Mais... pourquoi ?

Le visage défait, June reçu son papier des mains du concierge qui la renvoya sur ces mots: "Cette lettre n'est pas valable." Elle envoya tristement la main à April qui continua lentement son chemin. Elle sentait les larmes lui monter aux yeux et elles finirent par déborder, si bien qu'elle se heurta à Jack qui marchait dans les corridors. Il vit tout de suite les larmes de June et reçu contre lui une adolescente de 13 ans à l'extérieur, mais qui se sentait comme une fillette de 5 ans à l'intérieur. Elle n'avait pas l'habitude de se jeter ainsi sur tout le monde qui passait même pas Jack, mais là, elle avait vraiment besoin de lui. Pourquoi est-ce que la vie et le monde s'acharnaient sur sa pauvre personne ? Il finit par lui tirer les vers du nez, la fit asseoir sur un petit banc apparut de nulle part devant la porte menant au bureau du directeur, lui prit le papier des mains et entra dans le bureau du directeur. Il en sortit quelques minutes plus tard et la ramena dehors et l'envoya sans plus de façons à Pré-au-Lard. Depuis, elle n'eut plus aucun problème à se rendre au village sorcier.



- Ça me ferait très plaisir...

- Vraiment ?

Et oui ! Pendant un court instant, June avait eu peut qu'il ne refuse sa proposition pour des raisons nébuleuses. Vraiment heureuse, elle lui étreignit la main et sourit encore plus grand.

- Tu devrais aller te sécher si tu ne veux pas être malade le jour de la rentrée…

- Bah... J'irai voir mon professeur de potions préféré. Il doit bien avoir quelque chose contre le rhume dans ses armoires, non ? Je dois y aller maintenant. Mon cours de demain n'est même pas une ébauche.

Elle lui sourit une dernière fois et se dirigea vers le château. Elle faisait tourner sa bague autour de son doigt en réfléchissant. Soudain, elle s'arrêta et fit volte-face.

- Une dernière chose... Qu'est-ce que tu as dû faire pour qu'ils me laissent aller à Pré-au-Lard ?

Elle y avait cru jusqu'à ce qu'elle revoit la scène il y a quelques instants. L'attitude de Jack n'était que trop révélatrice et il était assez étonnant qu'elle ait gobé l'affaire. La vérité était sans doute qu'elle avait eu besoin de croire que sa mère était crédible.